« Refugios-Diarios (Lerro Galduak) » de Joxerra Melguizo peut être défini comme une cartographie poétique de l'atelier, une immersion dans la sincérité de la pratique artistique quotidienne. Melguizo transforme son travail en un journal visuel fait de traits, de symboles et d'une poétique particulière du gaspillage matériel. L'artiste cherche ici à retracer son expérience intime et l'écho de son travail d'atelier, qui se déploie dans des formes abstraites, des couleurs et des fragments d'images.
Jusqu'au 9 février, au Artium Museoa de Vitoria-Gasteiz, ce voyage à travers la dernière décennie créative de Melguizo est organisé comme une cartographie de son obsession pour le processus. La pièce maîtresse de l'exposition est une impressionnante installation murale composée de près d'un millier de dessins et de peintures sur une table. Cette fresque murale, qui s'étend sur près de 30 mètres de long et quatre mètres de haut, fonctionne comme une carte dans laquelle chaque œuvre, plutôt que de suivre un emplacement linéaire, est placée par des affinités émotionnelles et narratives non explicites.
L'origine de cette proposition d'exposition se trouve dans une conférence que Melguizo a donnée en 2019, invité par le musée pour parler de son travail. A cette occasion, l'artiste a raconté comment certaines circonstances personnelles l'avaient éloigné de sa routine quotidienne à l'atelier, une interruption involontaire qui a duré près de quatre ans. Cette période d'inactivité est interrompue par un besoin impérieux de créer, de se sentir vivant à travers la démarche artistique. À la fin de la conférence, Melguizo a montré au public les carnets de dessins et de notes qu'il avait accumulés au cours de cette période, ainsi qu'une grande série de peintures de table qui suggéraient une sorte de journal visuel : un langage qui lui est propre, fait de symboles, de explorations et réflexions sur la couleur et la ligne.
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À partir de la pratique, Melguizo semblait construire quelque chose pour poursuivre une poire plus qu'une œuvre ; il a créé une méthode qui lui a permis de rester dans la tâche de faire de l'art. Loin de rechercher la perfection formelle, il commence à documenter des épisodes de sa vie quotidienne, ainsi que les sentiments et les symboles qui les accompagnent.
L'exposition comprend également une pièce phare, "La medida del espacio III", dans laquelle Melguizo confronte la nature à la mesure humaine. En outre, une sélection d'objets d'archives du défunt espace CM2 est présentée, un projet que l'artiste a commencé dans les années 90 avec la collaboration de Carmen López Castillo et Emilio Melguizo. Le CM2 était bien plus qu'une galerie : c'était un espace de conspiration collective, un point de rencontre pour les nouvelles propositions d'art contemporain à Vitoria-Gasteiz.
Tout au long de sa carrière, Melguizo a consolidé une voix singulière qui remet en question les structures de pouvoir dans le système artistique, tant en termes institutionnels que sociaux, unissant esthétique et engagement social. Dans l'un de ses grands tableaux, Melguizo rend hommage à l'image emblématique du bassiste des Clash, Paul Simonon, déchiquetant sa basse au Palladium de New York. Cette référence devient une déclaration d'intentions : son art est aussi un acte de rébellion, une interpellation sociale et politique, qui trouve une résonance dans les échos d'Oteiza, Beuys et des premiers punks du Pays Basque.
Le travail de Melguizo propose un retour à l'atelier comme espace de résistance, comme refuge personnel où la création devient un moyen de survivre et de défier l'ordre établi.
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