Esther Boix était une peintre qui, même si elle n'est pas tombée dans l'oubli, mérite une reconnaissance bien plus large que celle qu'elle a reçue jusqu'à présent. Son œuvre, engagée et chargée de sens politique et social, est à nouveau mise en lumière avec une exposition à la Galerie Marc Domènech, la première à caractère individuel qui lui est consacrée depuis 2006, et l'une des plus importantes de ces dernières années. Cette exposition, visitable jusqu'au 4 octobre, rassemble trente tableaux qui couvrent une période cruciale de sa carrière : entre 1955 et 1975, Boix abandonne le réalisme naturaliste pour adopter un style expressif et dramatique, à forte charge psychologique et critique sociale.
À travers sa peinture, Boix explore non seulement la condition humaine, mais fait de son œuvre un cri silencieux contre l'injustice. L'un des exemples les plus significatifs de cette période sont ses autoportraits, où elle se présente comme une femme forte et déterminée, représentant une artiste engagée dans les temps turbulents dans lesquels elle a vécu.
L'œuvre d'Esther Boix se définit par une attitude de dénonciation constante. Engagée politiquement dès son plus jeune âge, elle fut une figure importante du mouvement antifranquiste, notamment au sein du groupe Estampa Popular de Barcelone, et utilisa sa peinture comme instrument pour exprimer les injustices subies par la société espagnole sous la dictature. Son souci des droits sociaux, notamment des abus contre les femmes, se manifeste dans un style figuratif puissant, où les formes fortes et les couleurs intenses soulignent la dureté de la réalité.
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Au cours des années 1960 et 1970, Boix a été l’un des premiers artistes à aborder et à remettre en question ouvertement les rôles traditionnels de genre, montrant ainsi la vulnérabilité des femmes sous le régime. Un exemple en est son œuvre « Gàbies », où l'artiste explore le sentiment d'oppression et d'isolement que subissaient de nombreuses femmes à cette époque. À travers cette œuvre, Boix représente non seulement la réalité physique du confinement, mais aussi l'emprisonnement symbolique des femmes dans les rôles de genre traditionnels. Cet engagement social et politique se reflète dans son œuvre de cette période, chargée de symbolisme et d'une énergie vitale qui cherche à éveiller la conscience du spectateur.
Une autre pièce clé que l'on peut voir dans cette exposition est « Confused Boundaries », qui illustre le tournant pris par l'artiste au milieu des années 1970. Dans cette œuvre, Boix abandonne partiellement son langage figuratif et se rapproche de l'abstraction, introduisant des formes biomorphiques et un chromatisme intense qui suggère un nouveau souci de la nature.
L'exposition organisée à la Galerie Marc Domènech est une occasion unique de revisiter le travail d'une artiste qui a su intégrer son combat personnel et collectif dans ses créations. Bien que l'exposition soit sur le point de se terminer, avec seulement quelques jours pour en profiter, c'est un rendez-vous incontournable pour ceux qui souhaitent redécouvrir la puissance d'une œuvre qui reste aussi d'actualité aujourd'hui que dans les années de sa création.
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